mercredi 28 août 2013

Bâtir un monde de bonté, de beauté et de vérité

Salut du Pape François au pélerinage des jeunes du diocèse italien de Piacenza-Bobbio (Basilique Vaticane - Autel de la Chaire).


Merci pour cette visite !

L’évêque a dit que j’ai accompli un grand geste en venant ici. Mais je l’ai fait par égoïsme. Savez-vous pourquoi ? Parce que j’aime être avec vous ! Et cela, c’est de l’égoïsme.

Pourquoi est-ce que j’aime être avec les jeunes ? Parce que vous avez dans votre cœur une promesse d’espérance. Vous êtes porteurs d’espérance. C’est vrai, vous vivez dans le présent, mais vous êtes tournés vers l’avenir... Vous êtes des artisans de l’avenir, des protagonistes de l’avenir. Et puis — et cela est votre joie —, il est beau d’aller vers l’avenir, avec les illusions, avec tant de belles choses — et cela est également votre responsabilité. Devenir artisans de l’avenir. Lorsque l’on me dit : « Mais, Père, quels temps difficiles nous vivons... Vois, on ne peut rien y faire ! ». Comment cela, on ne peut rien y faire ? Alors j’explique qu’il y a beaucoup à faire ! Mais lorsqu’un jeune me dit : « Quels temps difficiles nous vivons, Père, on ne peut rien y faire ! », eh bien, je l’envoie chez le « psy » ! Car, vraiment, on ne le comprend pas ! On ne comprend pas qu’un jeune, un garçon, une fille, puisse ne pas vouloir faire de grandes choses, parier sur de grands idéaux, importants pour l’avenir. Après, ils feront ce qu’ils peuvent, mais un défi a été lancé pour des choses grandes et belles. Et vous êtes des artisans de l’avenir. Pourquoi ? Parce que vous portez en vous trois désirs : le désir de la beauté. Vous aimez la beauté, et lorsque vous faites de la musique, du théâtre, de la peinture — des choses qui ont trait à la beauté — vous recherchez cette beauté, vous êtes des chercheurs de beauté ; c’est un premier point. Le deuxième point : vous êtes des prophètes de bonté. Vous aimez la bonté, être bons. Et cette bonté est contagieuse, elle aide tous les autres. Et aussi — troisième point — vous avez soif de vérité : chercher la vérité. « Mais, Père, moi je possède la vérité ! ». Mais tu te trompes, parce que l’on ne possède pas la vérité, on ne la porte pas en soi, on la rencontre. C’est une rencontre avec la vérité, qui est Dieu, mais il faut la chercher. Et ces trois désirs que vous avez dans le cœur, vous devez également les porter de l’avant, dans l’avenir, et préparer l’avenir à travers la beauté, la bonté et la vérité. Vous avez compris ? Voilà votre défi : c’est votre défi. Mais si vous êtes paresseux, si vous êtes tristes — c’est affreux, un jeune triste — si vous êtes tristes, eh bien, cette beauté ne sera pas beauté, cette bonté ne sera pas bonté et cette vérité sera quelque chose... Pensez-bien à cela : parier sur un grand idéal, l’idéal de bâtir un monde de bonté, de beauté et de vérité. Cela, vous pouvez le faire, vous avez le pouvoir de le faire. Si vous ne le faites pas, c’est par paresse. Voilà ce que je voulais vous dire, voilà ce que je voulais vous dire.

Je voulais vous dire cela, et aussi, courage, allez de l’avant, faites du bruit. Là où il y a des jeunes, il faut qu’il y ait du bruit. Après, les choses changent un peu, mais l’illusion d’un jeune, c’est de faire toujours du bruit. Allez de l’avant ! Dans la vie, il y aura toujours des personnes qui vous feront des propositions pour freiner, pour barrer votre route. S’il vous plaît, allez à contre-courant. Soyez courageux, courageuses, aller à contre-courant. On me dit : « Non mais, ceci, cela... Prends un peu d’alcool, prends un peu de drogue ». Non ! Allez à contre-courant de cette civilisation qui nous fait tant de mal. Vous avez bien compris cela ? Aller à contre-courant, et cela signifie faire du bruit, aller de l’avant, mais avec les valeurs de la beauté, de la bonté et de la vérité. Voilà ce que je voulais vous dire. Je veux vous souhaiter tout le bien possible, un beau travail, la joie dans votre cœur, des jeunes joyeux ! Et pour cela, je voudrais vous donner ma Bénédiction. Mais avant, tous ensemble, nous prierons la Vierge qui est la Mère de la beauté, la Mère de la bonté et la Mère de la vérité, afin qu’elle nous donne cette grâce du courage, car la Vierge était courageuse, elle avait du courage, cette femme ! Elle était bonne, bonne, bonne ! Demandons-lui, à Elle qui est au Ciel, qui est notre Mère, qu’elle nous donne la grâce du courage pour aller de l’avant et à contre-courant. Tous ensemble, comme vous êtes, ainsi, adressons la prière du Je vous salue Marie à la Vierge.

[Je vous salue Marie]
[Bénédiction]

Et je vous demande de prier pour moi, parce que ce travail est un travail « qui rend malade », il ne fait pas du bien... Priez pour moi !

L'inquiétude de la recherche spirituelle et de l'amour

Homélie du Pape François prononcée lors de la messe d'ouverture du Chapitre Général de l'Ordre de Saint Augustin.

« Tu nous as faits pour toi, et notre cœur est inquiet jusqu’à ce qu’il repose en toi » (Les Confessions, i, 1, 1). À travers ces paroles, devenues célèbres, saint Augustin s’adresse à Dieu dans les Confessions, et dans ces paroles est contenue la synthèse de toute sa vie.

« Inquiétude ». Cette parole me frappe et me fait réfléchir. Je voudrais partir d’une question : quelle inquiétude fondamentale Augustin vit-il dans sa vie ? Ou peut-être devrais-je plutôt dire quelles inquiétudes ce grand et saint homme nous invite-t-il à susciter et à maintenir vivantes dans notre vie ? J’en propose trois : l’inquiétude de la recherche spirituelle, l’inquiétude de la rencontre avec Dieu, l’inquiétude de l’amour.

La première, l’inquiétude de la recherche spirituelle. Augustin vit une expérience assez commune aujourd’hui, assez commune parmi les jeunes d’aujourd’hui. Il est éduqué par sa mère Monique dans la foi chrétienne, même s’il ne reçoit pas le baptême, mais en grandissant, il s’en éloigne, il ne trouve pas en elle la réponse à ses questions, aux désirs de son cœur, et il est attiré par d’autres propositions. Il entre alors dans le groupe des manichéens, il se consacre avec application à ses études, il ne renonce pas aux distractions insouciantes, aux spectacles de l’époque, aux amitiés intenses, il connaît l’amour intense et entreprend une brillante carrière de professeur de rhétorique qui le conduit jusqu’à la cour impériale de Milan. Augustin est un homme qui est « arrivé », il a tout, mais dans son cœur demeure l’inquiétude de la recherche du sens profond de la vie. Son cœur n’est pas endormi, je dirais qu’il n’est pas anesthésié par le succès, par les biens, par le pouvoir. Augustin ne se renferme pas sur lui-même, il ne se repose pas, il continue à chercher la vérité, le sens de la vie, il continue à chercher le visage de Dieu. Certes, il commet des erreurs, il emprunte aussi des mauvaises voies, il pèche, c’est un pécheur, mais il ne perd pas l’inquiétude de la recherche spirituelle. Et de cette façon, il découvre que Dieu l’attendait, et même qu’il n’avait jamais cessé de le chercher en premier. Je voudrais dire à ceux qui se sentent indifférents à l’égard de Dieu, de la foi, à ceux qui sont éloignés de Dieu ou qui l’ont abandonné, et à nous aussi, avec nos « éloignements » et nos « abandons » à l’égard de Dieu, petits, sans doute, mais qui sont si nombreux dans la vie quotidienne, regarde au plus profond de ton cœur, regarde au plus profond de toi, et demande-toi : as-tu un cœur qui désire quelque chose de grand ou un cœur endormi par les choses ? Ton cœur a-t-il conservé l’inquiétude de la recherche ou l’as-tu laisser s’étouffer par les choses, qui finissent par l’atrophier ? Dieu t’attend, il te cherche, que lui réponds-tu ? Te rends-tu compte de cette situation de ton âme ? Ou bien dors-tu ? Crois-tu que Dieu t’attend ou bien pour toi cette vérité ne représente-t-elle que « des mots » ?

Chez Augustin c’est précisément cette inquiétude du cœur qui le porte à la rencontre personnelle avec le Christ, qui le conduit à comprendre que ce Dieu qu’il cherchait loin de lui, est le Dieu proche de tout être humain, le Dieu proche de notre cœur, plus proche de nous que nous-mêmes (cf. ibid., III, 6, 11). Mais même dans la découverte et dans la rencontre avec Dieu, Augustin ne s’arrête pas, ne se repose pas, ne se renferme pas sur lui-même comme celui qui est déjà arrivé, mais il poursuit le chemin. L’inquiétude de la recherche de la vérité, de la recherche de Dieu, devient l’inquiétude de le connaître toujours plus et de sortir de soi pour le faire connaître aux autres. C’est précisément l’inquiétude de l’amour. Il voudrait une vie tranquille d’étude et de prière, mais Dieu l’appelle à être pasteur à Hippone, à un moment difficile, avec une communauté divisée et la guerre aux portes. Et Augustin se laisse inquiéter par Dieu, il ne se lasse pas de l’annoncer, d’évangéliser avec courage, sans crainte, il cherche à être l’image de Jésus Bon Pasteur qui connaît ses brebis (cf. Jn 10, 14), plus encore, comme j’aime à le répéter, qui « a l’odeur de son troupeau », et sort pour chercher celles qui se sont égarées. Augustin vit ce que saint Paul indique à Timothée et à chacun de nous : proclame la Parole, insiste à temps et à contretemps, annonce l’Évangile avec le cœur magnanime, le cœur grand (cf. 2 Tm 4, 2) d’un pasteur inquiet pour ses brebis. Le trésor d’Augustin est justement cette attitude: sortir toujours vers Dieu, sortir toujours vers le troupeau… C’est un homme en tension, entre ces deux sorties ; ne pas « privatiser » l’amour… toujours en chemin ! Toujours en chemin, disiez-vous, Père. Toujours inquiet ! Et cela est la paix de l’inquiétude. Nous pouvons nous demander, suis-je inquiet pour Dieu, pour l’annoncer, pour le faire connaître ? Ou est-ce que je me laisse séduire par cette mondanité spirituelle qui pousse à faire tout par amour de soi-même ? Nous, consacrés, pensons aux intérêts personnels, à l’efficacité des œuvres, au carriérisme. Tant de choses auxquelles nous pouvons penser… Est-ce que je me suis pour ainsi dire « installé » dans ma vie chrétienne, dans ma vie sacerdotale, dans ma vie religieuse, dans ma vie de communauté aussi, ou bien est-ce que je conserve la force de l’inquiétude pour Dieu, pour sa Parole, qui me porte à « aller à l’extérieur », vers les autres ?

Nous en venons à la dernière inquiétude, l’inquiétude de l’amour. Ici, je ne peux manquer de m’arrêter sur la mère, Monique ! Que de larmes a versées cette sainte femme pour la conversion de son fils ! Et combien de mères versent aujourd’hui encore des larmes pour que leurs enfants retournent au Christ! Ne perdez pas l’espérance dans la grâce de Dieu! Dans les Confessions nous lisons cette phrase qu’un évêque dit à sainte Monique, qui lui demandait d’aider son fils à retrouver le chemin de la foi : « Il est impossible que l’enfant de telles larmes périsse » (III, 12, 21). Augustin lui-même, après la conversion, écrit en s’adressant à Dieu : « Devant toi, ta fidèle servante, ma mère, me pleurait avec plus de larmes que d’autres mères n’en répandent sur un cercueil » (ibid., III, 11, 19). Femme inquiète, cette femme, qui, à la fin, dit cette belle parole : cumulatius hoc mihi Deus praestitit ! [mon Dieu me l’a donné avec surabondance] (ibid., ix, 10, 26). Celui pour lequel elle pleurait, Dieu le lui avait donné abondamment ! Et Augustin est l’héritier de Monique, il reçoit d’elle la semence de l’inquiétude. Voilà alors l’inquiétude de l’amour, chercher toujours, sans répit, le bien de l’autre, de la personne aimée, avec cette intensité qui porte aussi aux larmes. Me viennent à l’esprit Jésus qui pleure devant le sépulcre de son ami Lazare, Pierre qui, après avoir renié Jésus, croise son regard riche de miséricorde et d’amour et pleure amèrement, le Père qui attend sur la terrasse le retour de son fils et court à sa rencontre alors qu’il est encore loin. Il me vient à l’esprit la Vierge Marie qui, avec amour, suit son Fils Jésus jusqu’à la croix. Comment nous comportons-nous face à l’inquiétude de l’amour ? Croyons-nous à l’amour envers Dieu et envers les autres ? Ou sommes-nous nominalistes à ce sujet ? Non pas de façon abstraite, pas seulement en paroles, mais le frère concret que nous rencontrons, le frère qui est à côté de nous ! Nous laissons-nous inquiéter par leurs nécessités ou bien restons-nous enfermés en nous-mêmes, dans nos communautés, qui sont souvent pour nous une « communauté-confort » ? On peut parfois vivre dans un immeuble sans connaître celui qui vit à côté de nous, ou bien on peut vivre en communauté, sans vraiment connaître son propre confrère. Je pense avec douleur aux hommes consacrés qui ne sont pas féconds, qui sont des « vieux garçons ». L’inquiétude de l’amour pousse toujours à aller à la rencontre de l’autre, sans attendre que l’autre manifeste son besoin. L’inquiétude de l’amour nous offre le don de la fécondité pastorale, et nous devons nous demander, chacun de nous, comment se porte ma fécondité spirituelle, ma fécondité pastorale ?

Demandons au Seigneur pour vous, chers augustins, qui commencez votre chapitre général, et pour nous tous, qu’il garde dans notre cœur l’inquiétude spirituelle de le rechercher toujours, l’inquiétude de l’annoncer avec courage, l’inquiétude de l’amour envers tout frère et sœur. Ainsi soit-il.

dimanche 25 août 2013

Jésus préfère toujours le pécheur

Paroles du pape François avant l'angélus (en italien)
Chers frères et sœurs, bonjour !
L’Évangile d'aujourd'hui nous invite a réfléchir sur le thème du salut. Jésus monte de la Galilée vers la cité de Jérusalem et le long du chemin, quelqu'un – raconte l’évangéliste Luc – s'approche de lui et lui demande : « Seigneur, n'y aura-t-il que peu de gens à être sauvés ? » (13,23). Jésus ne répond pas directement à la question : il n'est pas important de savoir combien seront sauvés, mais il est plutôt important de savoir quel est le chemin du salut. Et voici que Jésus répond à cette question en disant : « Efforcez-vous d'entrer par la porte étroite, car, je vous le déclare, beaucoup chercheront à entrer et ne le pourront pas. » (v. 24). Qu'est-ce que veut dire Jésus ? Quelle est la porte par laquelle nous devons entrer ? Et pourquoi Jésus parle d'une porte étroite ?
L’image de la porte revient plusieurs fois dans l’Évangile et rappelle celle de la maison, du foyer domestique, où nous trouvons sécurité, amour, chaleur. Jésus nous dit qu'il y a une porte qui nous fait entrer dans la famille de Dieu, dans la chaleur de la maison de Dieu, de la communion avec Lui. Cette porte est Jésus même (cf. Jn 10,9). Il est la porte. Il est le passage pour le salut. Il nous conduit au Père. Et la porte qu'est Jésus n'est jamais fermée, cette porte n'est jamais fermée, est toujours ouverte et à tous, sans distinction, sans exclusion, sans privilège. Parce que, vous savez, Jésus n'exclut personne. Quelqu'un de vous pourrait peut-être me dire : "Mais, Père, sûrement je suis exclu, parce que je suis un grand pécheur: j'ai fait des choses mauvaises, j'en ai fait tant, dans ma vie". Non, tu n'es pas exclu ! Précisément pour ceci tu es le préféré, parce que Jésus préfère toujours le pécheur, pour lui pardonner, pour l'aimer. Jésus t'attend pour te prendre dans ses bras, pour te pardonner. Ne pas avoir peur : Il t'attend. Donnez-vous du courage pour entrer par sa porte. Tous sont invités à franchir cette porte, à franchir la porte de la foi, à entrer dans sa vie, et à Le faire entrer dans notre vie, pour qu'Il la transforme, la renouvelle, lui donne une joie pleine et durable.
Aujourd'hui nous passons devant tant de portes qui invitent à entrer en promettant un bonheur dont nous nous apercevons ensuite qu'il dure seulement un instant, qu'il s'épuise en lui même et n'a pas d'avenir. Mais je vous demande : nous, par quelle porte voulons-nous entrer ? Et qui voulons-nous faire entrer par la porte de notre vie ? Je voudrais dire avec force : n'ayons pas peur de franchir la porte de la foi en Jésus, de le laisser entrer toujours plus dans notre vie, de sortir de nos égoïsmes, de nos fermetures, de nos indifférences envers les autres. Pour que Jésus illumine notre vie par une lumière qui ne s'éteint plus. Ce n'est pas un feu d'artifice, ce n'est pas un flash! Non, c'est une lumière tranquille qui dure toujours et nous donne la paix. Ainsi est la lumière que nous rencontrons si nous entrons par la porte de Jésus.

Certes la porte de Jésus est une porte étroite, non parce qu'elle est une salle de torture. Non, pas pour cela ! Mais parce qu'Il nous demande de Lui ouvrir son coeur, de nous reconnaître des pécheurs, qui ont besoin de son salut, de son pardon, de son amour, d'avoir l'humilité d'accueillir sa miséricorde et de nous faire renouveler par Lui. Jésus dans l’Évangile nous dit qu'être chrétien ce n'est pas porter une « étiquette » ! Je vous le demande : êtes-vous des chrétiens d'étiquette ou en vérité ? Que chacun réponde à l'intérieur de lui-même ! Jamais chrétiens d'étiquette ! Chrétiens de vérité, de coeur. Être chrétiens c'est vivre et témoigner la foi dans la prière, dans les œuvres de charité, en promouvant la justice, en accomplissant le bien. Par la porte étroite qu'est le Christ, doit passer toute notre vie.

A la Vierge Marie, Porte du Ciel, demandons qu'elle nous aide à franchir la porte de la foi, à laisser son Fils transformer notre existence comme il a transformé la sienne pour porter à tous la joie de l’Évangile.

Appel pour la Syrie

Avec grande souffrance et préoccupation, je continue à suivre la situation en Syrie. L’augmentation de la violence dans cette guerre entre frères, avec la multiplication des massacres et des actes atroces, que nous avons tous pu voir encore dans les terribles images de ces jours, me pousse encore une fois à élever la voix pour que cesse le bruit des armes. Ce n'est pas l'affrontement qui offre des perspectives d'espérance pour résoudre les problèmes, mais c'est la capacité de rencontre et de dialogue.

Du plus profond de mon coeur, je voudrais manifester ma proximité, par la prière et la solidarité à toutes les victimes de ce conflit, à tous ceux qui souffrent, spécialement les enfants, et inviter à garder toujours vive l'espérance de paix. Je lance un appel à la communauté internationale pour qu'elle se montre plus sensible envers cette situation tragique et mette toute son implication pour aider la bien-aimée nation syrienne à trouver une solution à une guerre qui sème destruction et mort.

Tous ensemble, prions, tous ensemble prions la Vierge, Reine de la paix : Marie, Reine de la Paix, priez pour nous. Tous : Marie, Reine de la Paix, priez pour nous.

jeudi 22 août 2013

Prophètes d'espérance

Message du Pape François au Prieur général de l'Ordre des Frères de la Bienheureuse Vierge Marie du Mont Carmel, à l'occasion du Chapitre Général.

Au révérend père Fernando Millán Romeral, Prieur général de l’ordre des Frères de la Bienheureuse Vierge Marie du Mont Carmel.

Je m’adresse à vous, chers frères de l’ordre de la Bienheureuse Vierge Marie du Mont Carmel, qui célébrez en ce mois de septembre votre chapitre général. En un temps de grâce et de renouveau, qui vous appelle à discerner la mission du glorieux ordre carmélite, je souhaite vous offrir une parole d’encouragement et d’espérance. L’antique charisme du Carmel a été pendant huit siècles un don pour toute l’Église, et aujourd’hui encore, il continue d’offrir sa contribution particulière pour l’édification du Corps du Christ et pour en montrer au monde le visage lumineux et saint. Vos origines contemplatives naissent de la terre de l’épiphanie de l’amour éternel de Dieu en Jésus Christ, Verbe fait chair. Tandis que vous réfléchissez sur votre mission de Carmes d’aujourd’hui, je vous suggère de considérer trois éléments qui peuvent vous guider dans la pleine réalisation de votre vocation qui est l’ascension du mont de la perfection : l’obéissance au Christ, la prière et la mission.

Obéissance

L’Église a la mission d’apporter le Christ au monde et pour cette raison, comme Mère et Maîtresse, elle invite chacun à s’approcher de Lui.

Dans la liturgie des carmes, pour la fête de la Vierge du Mont Carmel, nous contemplons la Vierge qui est « à côté de la Croix du Christ ». C’est aussi la place de l’Église : auprès du Christ. Et c’est aussi la place de chaque fils fidèle de l’ordre du Carmel. Votre Règle commence par l’exhortation aux frères à « vivre dans l’obéissance de Jésus Christ », pour le suivre et le servir avec un cœur pur et entier. L’étroite relation avec le Christ se réalise dans la solitude, dans l’assemblée fraternelle et dans la mission. « L’option fondamentale d’une vie concrètement et radicalement consacrée à la suite du Christ » (Ratio Institutionis Vitae Carmelitanae, n. 8) fait de votre existence un pèlerinage de transformation dans l’amour. Le Concile œcuménique Vatican II rappelle le rôle de la contemplation dans le chemin de la vie : en effet, « il appartient en propre à l’Église d’être à la fois humaine et divine, visible et riche de réalités invisibles, fervente dans l’action et adonnée à la contemplation, présente dans le monde et cependant en chemin » (Sacrosanctum Concilium, n. 2). Les anciens ermites du Mont Carmel conservèrent la mémoire de ce lieu saint et, même exilés ou éloignés, ils maintenaient le regard et le cœur constamment fixés sur la gloire de Dieu. En réfléchissant sur vos origines et sur votre histoire et en contemplant l’immense foule de ceux qui ont vécu au fil des siècles le charisme du carmel, vous découvrirez aussi votre vocation actuelle à être des prophètes d’espérance. Et c’est précisément dans cette espérance que vous serez régénérés. Souvent ce qui apparaît nouveau est quelque chose de très ancien éclairé sous une lumière nouvelle.

Dans votre Règle se trouve le cœur de la mission carmélitaine d’alors et encore d’aujourd’hui. Tandis que vous vous apprêtez à célébrer le huitième centenaire de la mort d’Albert, patriarche de Jérusalem, en 1214, vous vous souviendrez qu’il formula un « parcours de vie, un espace qui rend capables de vivre une spiritualité totalement orientée vers le Christ ». Il traça les éléments extérieurs et intérieurs, une écologie physique de l’espace et l’armature spirituelle nécessaire pour répondre de manière adéquate à la vocation et accomplir efficacement sa propre mission.

Dans un monde qui méconnaît souvent le Christ et, de fait, le refuse, vous êtes invités à vous approcher et à adhérer toujours plus profondément à Lui. C’est un appel incessant à suivre le Christ et à être configurés à Lui. Cela est d’une importance vitale dans notre monde tellement désorienté, « parce que, lorsque sa flamme s’éteint, toutes les autres lumières finissent par perdre leur vigueur » (Lumen fidei, n. 4). Le Christ est présent dans votre fraternité, dans la liturgie communautaire et dans le ministère qui vous est confié : renouvelez-lui l’obéissance de toute votre vie !

Prière

Le Saint-Père Benoît XVI, avant votre chapitre général de 2007, vous rappela que « le pèlerinage intérieur de foi vers Dieu commence dans la prière » ; et à Castel Gandolfo, en août 2010, il vous dit : « Vous êtes ceux qui nous enseignent à prier ». Vous vous définissez comme contemplatifs au milieu du peuple. En effet, s’il est vrai que vous êtes appelés à vivre sur les hauteurs du Carmel, il est tout aussi vrai que vous êtes appelés à rendre témoignage au milieu du peuple. La prière est cette « voie royale » qui ouvre aux profondeurs du mystère de Dieu Un et Trine, mais c’est aussi le sentier obligé qui serpente au milieu du peuple de Dieu en pèlerinage dans le monde vers la Terre Promise.

Une des plus belles voies pour entrer dans la prière passe à travers la Parole de Dieu. La lectio divina introduit à la conversation directe avec le Seigneur et ouvre les trésors de la sagesse. L’amitié intime avec Celui qui nous aime nous rend capables de voir avec les yeux de Dieu, de parler avec sa Parole dans le cœur, de conserver la beauté de cette expérience et de la partager avec ceux qui ont faim d’éternité.

Le retour à la simplicité d’une vie centrée sur l’Évangile est le défi pour le renouveau de l’Église, communauté de foi qui trouve toujours des parcours nouveaux pour évangéliser le monde en perpétuelle transformation. Les saints carmes ont été de grands prédicateurs et maîtres de prière. C’est cela, encore une fois, qui est demandé au Carmel du XXIe siècle. Tout au long de votre histoire, les grands carmes ont été un fort rappel aux racines de la contemplation, racines toujours fécondes de prière. C’est là que se trouve le cœur de votre témoignage : la dimension contemplative de l’Ordre, à vivre, à cultiver et à transmettre. Je voudrais que chacun se demande : comment est ma vie de contemplation ? Combien de temps est-ce que je consacre au cours de ma journée à la prière et à la contemplation ? Un carme sans cette vie contemplative est un corps mort ! Aujourd’hui, peut-être plus que par le passé, il est facile de se laisser distraire par les préoccupations et par les problèmes de ce monde et se laisser fasciner par de fausses idoles. Notre monde est éclaté de bien des façons ; le contemplatif en revanche revient à l’unité et constitue un fort rappel à l’unité. À présent plus que jamais, c’est le moment de redécouvrir le sentier intérieur de l’amour à travers la prière et d’offrir aux personnes d’aujourd’hui dans le témoignage de la contemplation, ainsi que dans la prédication et dans la mission non pas d’inutiles raccourcis, mais cette sagesse qui naît du fait de méditer « jour et nuit dans la Loi du Seigneur », une Parole qui conduit toujours auprès de la croix glorieuse du Christ. Et, unie à la contemplation, l’austérité de vie n’est pas un aspect secondaire de votre vie et de votre témoignage. C’est une tentation très forte pour vous aussi de tomber dans la mondanité spirituelle. L’esprit du monde est l’ennemi de la vie de prière : ne l’oubliez jamais ! Je vous exhorte à une vie plus austère et pénitente, selon votre tradition la plus authentique, une vie loin de toute mondanité, loin des critères du monde.

Mission

Chers frères carmes, votre mission est la mission même de Jésus. Toute programmation, toute confrontation seraient bien peu utiles si le chapitre ne réalisait pas avant tout un chemin de vrai renouveau. La famille du Carmel a connu un merveilleux « printemps », dans le monde entier, en tant que fruit, offert par Dieu, de l’engagement missionnaire du passé. Aujourd’hui, la mission présente parfois des défis ardus, parce que le message évangélique n’est pas toujours accueilli et parfois il est même rejeté avec violence. Nous ne devons jamais oublier que, même si nous sommes jetés dans des eaux troubles et inconnues, Celui qui nous appelle à la mission nous donne aussi le courage et la force de la mettre en œuvre. Par conséquent, célébrez le chapitre animés par l’espérance qui ne meurt jamais, avec un fort esprit de générosité pour retrouver la vie contemplative, ainsi que la simplicité et l’austérité évangéliques.

En m’adressant aux pèlerins sur la place Saint-Pierre, j’ai pu dire : « Chaque chrétien et chaque communauté est missionnaire dans la mesure où il porte et vit l’Évangile et témoigne de l’amour de Dieu envers tous, spécialement envers celui qui se trouve en difficulté. Soyez missionnaires de l’amour et de la tendresse de Dieu ! Soyez missionnaires de la miséricorde de Dieu, qui toujours nous pardonne, toujours nous attend, nous aime beaucoup ! » (Homélie, 5 mai 2013). Le témoignage du Carmel par le passé appartient à la profonde tradition spirituelle qui s’est développée dans une des grandes écoles de prière. Elle a suscité aussi le courage d’hommes et de femmes qui ont affronté le danger et même la mort. Rappelons uniquement les grands martyrs contemporains : sainte Thérèse Bénédicte de la Croix et le bienheureux Titus Brandsma. Je me demande alors : aujourd’hui, parmi vous, vit-on avec la personnalité, avec le courage de ces saints ?

Chers frères du Carmel, le témoignage de votre amour et de votre espérance, enracinés dans la profonde amitié avec le Dieu vivant, peut arriver comme une « brise légère » qui renouvelle et revigore votre mission ecclésiale dans le monde d’aujourd’hui. C’est à cela que vous êtes appelés. Le rite de la Profession met ces paroles sur vos lèvres : « Avec cette profession, je me confie à la famille du Carmel pour vivre au service de Dieu et dans l’Église et aspirer à la charité parfaite avec la grâce du Saint-Esprit et l’aide de la Bienheureuse Vierge Marie » (Rituel de la Profession Ord. Carm.).

Que la Bienheureuse Vierge Marie, Mère et Reine du Carmel, accompagne vos pas et rende fécond en fruits le chemin quotidien vers le Mont de Dieu. J’invoque sur toute la famille du Carmel, et en particulier sur les pères capitulaires, d’abondants dons de l’Esprit divin, et je donne à tous de tout cœur la Bénédiction apostolique implorée.

Du Vatican, le 22 août 2013

mercredi 21 août 2013

Il ne peut pas y avoir de paix sans dialogue

Le pape François a reçu en audience les étudiants et professeur du Collège "Seibu Gakuen Bunri Junior High School de Saitama", (Tokyo, Japon), à 11h ce mercredi 21 août 2013, dans la cour Saint-Damase du Vatican.

Bonjour !

On voit qu'ils comprennent l’italien…

Je vous salue ! Cette visite est pour moi un plaisir. J'espère que ce voyage sera pour vous très fructueux, car connaître d'autres personnes, d'autres cultures, nous fait toujours tant de bien, nous fait grandir.

Et pourquoi cela ? Parce que si nous sommes isolés en nous-mêmes, nous avons seulement ce que nous possédons, nous ne pouvons grandir culturellement ; au contraire, si nous allons trouver d'autres personnes, d'autres cultures, d'autres façons de penser, d'autres religions, nous sortons de nous-mêmes et commençons cette aventure si belle qui s'appelle "dialogue"Le dialogue est très important pour sa maturité personnelle, car dans la confrontation avec l'autre personne, dans la confrontation avec les autres cultures, et également dans la saine confrontation avec les autres religions, chacun croît : il grandit, il mûrit.

Certes, il y a un danger : si dans le dialogue l'un se ferme et se met en colère, on peut se disputer ; c'est le danger de la dispute, et cela ne va pas parce que nous dialoguons pour nous trouver, non pour nous disputer.

Quelle est l'attitude la plus profonde que nous devons avoir pour dialoguer et ne pas se disputer ? La douceur, la capacité de rencontrer les personnes, de rencontrer les cultures, dans la paix ; la capacité de poser des questions intelligentes : "Mais pourquoi penses-tu ainsi ? Pourquoi cette culture fait-elle ainsi ?". Écouter les autres et puis parler. D'abord écouter, puis parler. Tout cela est la douceur. Et si tu ne penses pas comme moi – mais tu sais… je pense de façon différente, tu ne me convaincs pas – nous sommes quand même amis, j'ai écouté ta manière de penser et tu as écouté la mienne.

Et savez-vous quelque chose d'important ? Ce dialogue est celui qui construit la paix. Il ne peut pas y avoir de paix sans dialogue. Toutes les guerres, toutes les luttes, tous les problèmes qui ne se résolvent pas, qui opposent, existent à cause d'un manque de dialogue. Quand il y a un problème, je dialogue : cela fait la paix. C'est ce que je vous souhaite, dans ce voyage de dialogue : que vous sachiez dialoguer – comment pense cette culture, que cela est beau, cela ne me plaît pas, mais en dialoguant. C'est ainsi que l'on grandit. Je vous souhaite cela et je vous souhaite un beau voyage à Rome.

Je souhaite le meilleur pour vous, pour votre école, pour vos familles. Que Dieu vous bénisse tous. Merci.

dimanche 18 août 2013

Depuis que Jésus est venu dans le monde, on ne peut pas faire comme si on ne connaissait pas Dieu

Paroles du pape François avant l'angélus (en italien).

Chers frères et sœurs, bonjour !

Dans la Liturgie d'aujourd'hui, écoutons ces paroles de la Lettre aux Hébreux : « nous courons avec endurance l’épreuve qui nous est proposée, les yeux fixés sur Jésus, qui est à l'origine et au terme de la foi. » (Hb 12,1-2). C'est une expression que nous devons souligner de façon particulière en cette Année de la foi. Nous aussi, durant toute cette année, nous tenons les yeux fixés sur Jésus, car la foi, qui est notre “oui” à la relation filiale avec Dieu, vient de Lui... de Jésus : c'est Lui l’unique médiateur de cette relation entre nous et notre Père qui est aux Cieux. Jésus est le Fils, et nous sommes fils en Lui.

Mais la Parole de Dieu de ce dimanche contient aussi une parole de Jésus qui provoque une crise et qui doit être expliquée, pour ne pas générer de malentendus. Jésus dit aux disciples : « Pensez-vous que je sois venu mettre la paix dans le monde ? Non, je vous le dis, mais plutôt la division. » (Lc 12,51). Qu'est-ce que cela signifie ? Cela signifie que la foi n'est pas une chose décorative, ornementale ; vivre la foi n'est pas décorer la vie avec un peu de religion, comme on décore un gâteau avec de la crème. Non, la foi n'est pas cela. La foi implique de choisir Dieu comme critère-base de la vie, et Dieu n'est pas vide, Dieu n'est pas neutre, Dieu est toujours positif, Dieu est amour, et l'amour est toujours positif ! Depuis que Jésus est venu dans le monde, on ne peut pas faire comme si on ne connaissait pas Dieu. Comme s'il était une chose abstraite, vide, une référence purement nominale. Non, Dieu a un visage concret, il a un nom : Dieu est miséricorde, Dieu est fidélité, il est vie qui se donne à nous tous. C'est pour cela que Jésus dit : je suis venu apporter la division ; non pas que Jésus veuille diviser les hommes entre eux, au contraire : Jésus est notre paix, il est notre réconciliation ! Mais cette paix n'est pas la paix des tombeaux, elle n'est pas neutralité, Jésus n'apporte pas la neutralité, cette paix n'est pas un compromis à tout prix. Suivre Jésus implique de renoncer au mal, à l'égoïsme, et de choisir le bien, la vérité, la justice, y compris quand cela demande sacrifice et renoncement à ses propres intérêts. Et ceci divise, nous le savons, ceci divise aussi les liens les plus étroits. Mais attention : ce n'est pas Jésus qui divise ! Il pose le critère : vivre pour soi-même, ou vivre pour Dieu et pour les autres ; se faire servir ou servir ; obéir à son « moi » ou obéir à Dieu. Voici en quel sens Jésus est « signe de contradiction » (Lc 2,34).

Donc, cette parole de l’Évangile n'autorise pas du tout l'usage de la force pour répandre la foi. C'est tout le contraire : la vraie force du chrétien est la force de la vérité et de l'amour, qui implique de renoncer à toute violence. Foi et violence sont incompatibles. Foi et violence sont incompatibles ! Au contraire foi et force vont de pair. Le chrétien n'est pas violent, mais il est fort. De quelle force ? Celle de la douceur, la force de la douceur, la force de l'amour.

Chers amis, parmi les parents de Jésus aussi, certains n'ont pas partagé sa façon de vivre et de prêcher, comme le dit l’Évangile (cf. Mc 3,20-21). Mais sa Mère l'a toujours suivi fidèlement, en gardant les yeux de son cœur fixés sur Jésus, le Fils du Très-Haut, et sur son mystère. Et finalement, grâce à la foi de Marie, les parents de Jésus ont fait partie de la première communauté chrétienne (cf. Ac 1,14). Demandons à Marie qu'elle nous aide nous aussi à tenir le regard fixé sur Jésus et à le suivre toujours, même quand cela coûte.

Paroles après l'angélus :

Rappelez-vous ceci : suivre Jésus n'est pas neutre. Suivre Jésus c'est s'impliquer, parce que la foi n'est pas une chose décorative, elle est force de l'âme.

jeudi 15 août 2013

Chaque "oui" à Dieu est un pas vers le ciel

Paroles du pape avant l’angélus.

Chers frères et sœurs,

À l’issue de cette célébration, nous nous tournons vers la Vierge Marie par la prière de l’angélus. Le chemin de Marie vers le Ciel a commencé par ce "oui" prononcé à Nazareth, en réponse au messager céleste qui lui annonçait la volonté de Dieu sur elle. Et en réalité, c’est exactement comme cela : chaque "oui" à Dieu est un pas vers le Ciel, vers la vie éternelle. Parce que ce que veut le Seigneur, c’est que tous ses enfants aient la vie en abondance ! Dieu nous veut tous avec lui, dans sa maison !

Il nous arrive malheureusement des nouvelles douloureuses d’Égypte. Je désire assurer de ma prière toutes les victimes et leurs familles, les blessés et toutes les personnes qui souffrent. Prions ensemble pour la paix, pour le dialogue et la réconciliation sur cette Terre bien-aimée et dans le monde entier. Marie, Reine de la paix, prie pour nous. Disons tous : Marie, Reine de la paix, prie pour nous.

Je désire rappeler le 25ème anniversaire de la Lettre apostolique Mulieris dignitatem, du bienheureux pape Jean-Paul II, sur la dignité et la vocation de la femme. Ce document est riche de remarques qui méritent d’être reprises et développées ; et à la base de tout cela, se trouve la figure de Marie ; en effet, ce document est sorti à l’occasion de l’Année mariale. Faisons nôtre la prière rédigée à la fin de cette Lettre apostolique (cf. n. 31), afin que, en méditant le mystère biblique de la femme, condensé en Marie, toutes les femmes s’y retrouvent elles-mêmes et y trouvent la plénitude de leur vocation et que l’on approfondisse et comprenne de plus en plus, dans toute l’Église, le rôle si grand et si important de la femme !

Je remercie toutes les personnes présentes, les habitants de Castelgandolfo et les pèlerins ! Je vous remercie, vous, les habitants de Castelgandolfo : merci beaucoup ! Et tous les pèlerins, en particulier ceux de Guinée avec leur évêque.

[En espagnol]

Je salue affectueusement les élèves du Collège passioniste « Michael Ham » de Vicente López, d’Argentine, ainsi que les jeunes de l’orchestre de musique du Collège José de Jesús Rebolledo, de Coatepec, au Mexique.

Et maintenant, tous ensemble, prions la Vierge :

Angelus Domini…

Je vous souhaite une bonne fête aujourd’hui, en ce jour de la Vierge Marie. Bonne fête et bon déjeuner !

Source

Être chrétien signifie croire que le Christ est vraiment ressuscité des morts

Homélie du Pape pour la fête de l'Assomption.

Chers frères et sœurs !

A la fin de la Constitution sur l’Eglise, le Concile Vatican II nous a laissé une très belle méditation sur la Vierge Marie. Je rappelle seulement les expressions qui se réfèrent au mystère que nous célébrons aujourd’hui : la première est celle-ci : « La Vierge Immaculée, préservée (par Dieu) de toute atteinte de la faute originelle, ayant accompli le cours de sa vie terrestre, fut élevée corps et âme à la gloire du ciel, et exaltée par le Seigneur comme Reine de l’univers » (n. 59). Et ensuite, vers la fin, il y a cette autre expression : « Tout comme dans le ciel, où elle est déjà glorifiée corps et âme, la Mère de Jésus représente et inaugure l’Eglise en son achèvement dans le siècle futur, de même sur cette terre, en attendant la venue du Jour du Seigneur, elle brille déjà comme un signe d’espérance assurée et de consolation, devant le peuple de Dieu en pèlerinage » (n. 68). A la lumière de cette très belle icône de notre Mère, nous pouvons entendre le message contenu dans les lectures bibliques que nous venons d’entendre. Nous pouvons nous concentrer sur trois paroles-clé : lutte, résurrection, espérance.

Le passage de l’Apocalypse présente la vision de la lutte entre la femme et le dragon. La figure de la femme, qui représente l’Eglise, est d’un côté glorieuse, triomphante, et de l’autre, encore en travail. Telle est, en effet, l’Eglise : si elle est déjà associée, au ciel, à la gloire de son Seigneur, elle vit continuellement, dans l’histoire, les épreuves et les défis que comporte le conflit entre Dieu et le Malin, l’ennemi de toujours. Et dans cette lutte, que les disciples de Jésus doivent affronter - nous tous, nous, tous les disciples de Jésus nous devons affronter cette lutte - Marie ne les laisse pas seuls ; la Mère du Christ et de l’Eglise est toujours avec nous. Toujours, elle marche avec nous, elle est avec nous. Marie aussi, en un certain sens, partage cette double condition. Naturellement, elle est désormais, une fois pour toutes, entrée dans la gloire du ciel. Mais cela ne signifie pas qu’elle soit loin, qu’elle soit séparée de nous ; au contraire, Marie nous accompagne, elle lutte avec nous, elle soutient les chrétiens dans le combat contre les forces du mal. La prière avec Marie, en particulier le Rosaire - écoutez bien : le Rosaire. Est-ce que vous priez le Rosaire tous les jours ? Je ne sais… [la foule crie : Oui !] C’est sûr ? Et bien la prière avec Marie, en particulier le Rosaire a aussi cette dimension « agonistique », c'est-à-dire de lutte, une prière qui soutient dans la bataille contre le Malin et ses complices. Le Rosaire aussi nous soutient dans la bataille.

La seconde lecture nous parle de la résurrection. L’Apôtre Paul, écrivant aux Corinthiens, insiste sur le fait qu’être chrétien signifie croire que le Christ est vraiment ressuscité des morts. Toute notre foi se base sur cette vérité fondamentale qui n’est pas une idée mais un événement. De même, le mystère de l’Assomption de Marie corps et âme est tout entier inscrit dans la Résurrection du Christ. L’humanité de la Mère a été « attirée » par le Fils dans son passage à travers la mort. Jésus est entré une fois pour toutes dans la vie éternelle avec toute son humanité, celle qu’il avait prise de Marie ; ainsi, Elle, la Mère, qui l’a suivi fidèlement toute sa vie, qui l’a suivi avec son cœur, est entrée avec Lui dans la vie éternelle, que nous appelons aussi le ciel, le Paradis, la Maison du Père.

Marie a connu aussi le martyre de la croix : le martyre de son cœur, le martyre de son âme. Elle a tant souffert dans son cœur, pendant que Jésus souffrait sur la croix. La Passion du Fils, elle l’a vécue jusqu’au fond de son âme. Elle a été pleinement unie à Lui dans la mort, et à cause de cela, le don de la résurrection lui a été fait. Le Christ est le premier des ressuscités, et Marie est la première des rachetés, la première de « ceux qui appartiennent au Christ ». Elle est notre Mère, mais nous pouvons dire aussi qu’elle est notre représentante, elle est notre sœur, notre grande sœur, elle est la première des rachetés qui est arrivée au ciel.

L’Evangile nous suggère la troisième parole : espérance. L’espérance est la vertu de qui, faisant l’expérience du conflit, de la lutte quotidienne entre la vie et la mort, entre le bien et le mal, croit en la Résurrection du Christ, en la victoire de l’Amour. Nous avons entendu le chant de Marie, le Magnificat : C’est le cantique de l’espérance, le cantique du Peuple de Dieu en marche dans l’histoire. C’est le cantique de tant de saints et de saintes, certains connus, d’autres, beaucoup plus nombreux, inconnus, mais bien connus de Dieu : mamans, papas, catéchistes, missionnaires, prêtres, sœurs, jeunes, également des enfants, grand pères, grand mères : ils ont affronté la lutte de la vie en portant dans le cœur l’espérance des petits et des humbles. Marie dit : « Mon âme exalte le Seigneur ». L’Eglise le chante encore aujourd’hui et elle le chante partout dans le monde. Ce cantique est particulièrement intense là où le Corps du Christ souffre aujourd’hui la Passion. Où il y a la croix, pour nous chrétiens, il y a l’espérance, toujours. S’il n’y a pas l’espérance, nous ne sommes pas chrétiens. C’est pourquoi j’aime dire : ne vous laissez pas voler l’espérance. Qu’on ne nous vole pas l’espérance, parce que cette force est une grâce, un don de Dieu qui nous porte en avant, en regardant le ciel. Et Marie est toujours là, proche de ces communautés, de nos frères, elle marche avec eux, elle souffre avec eux, et elle chante avec eux le Magnificat de l’espérance.

Chers frères et sœurs, unissons-nous, nous aussi, de tout notre cœur, à ce cantique de patience et de victoire, de lutte et de joie, qui unit l’Eglise triomphante et l’Eglise pérégrinante, qui unit la terre et le ciel, qui unit notre histoire et l’éternité, vers laquelle nous marchons.

Ainsi soit-il.

mardi 13 août 2013

"Je vous demande de vivre le sport comme un don de Dieu et une responsabilité"

Le pape a reçu au Vatican les équipes de football et les délégations nationales d'Italie et d'Argentine venues à Rome pour le match amical du 14 août au Stade olympique de Rome en son honneur, et prononcé le discours suivant.

Chers amis, [Queridos amigos, Cari amici], faisons moitié en italien et moitié en espagnol.

(En italien)

Je vous remercie de cette visite, à l'occasion du match amical entre les équipes nationales de football d'Italie et d'Argentine. Ce sera un peu difficile pour moi de faire le supporter, mais heureusement, c'est un match amical... et qu'il soit vraiment ainsi, je vous y invite!

Je remercie les dirigeants de la Fédration italienne de Football (Federazione Italiana Giuoco Calcio, FIGC) et ceux de la Fédération d'Argentine. Je salue les athlètes des deux équipes nationales.

Vous, chers joueurs, vous êtes très populaires : les gens vous suivent beaucoup, non seulement lorsque vous êtes sur le terrain, mais aussi en-dehors. C'est une responsabilité sociale! Je m'explique : dans le jeu, lorsque vous êtes sur le terrain, il y a la beauté, la gratuité et la camaraderie. S'il manque cela à un match, il perd sa force, même si l'équipe gagne. Il n'y a pas de place pour l'individualisme, mais tout est coordination pour l'équipe. Ces trois choses - beauté, gratuité, camaraderie - se trouvent résumés par un terme sportif que l'on ne doit jamais abandonner : "dilettante", "amateur". C'est vrai que l'organisation nationale et internationale professionnelle ne doit jamais laisser de côté la vocation initiale d'un sportif ou d'une équipe : être amateur, "dilettante".

Tout en étant un professionnel, un sportif, lorsqu'il cultive cette dimension de "dilettante", fait du bien à la société, construit le bien commun à partir des valeurs de la gratuité, de la camaraderie, de la beauté.

Et cela vous amène à penser, avant d'être des champions, que vous êtes des hommes, des personnes humaines, avec vos qualités et vos défauts, avec votre coeur et vos idées, vos aspirations et vos problèmes. Et alors, même si vous êtes des personnalités, vous restez toujours des hommes, dans le sport et dans la vie. Des hommes porteurs d'humanité.

A vous, les dirigeants, je voudrais offrir un encouragement pour votre travail. Le sport est important, mais il doit être du vrai sport! Le football, comme certaines autres disciplines, est devenu un grand business! Travaillez à ce qu'il ne perde pas son caractère sportif. Promouvez vous aussi cette attitude de "dilettante" qui, d'autre part, élimine définitivement le danger de la discrimination. Quand les équipes prennent ce chemin, le stade s'enrichit humainement, la violence disparaît et on recommence à voir des familles dans les gradins.


(En espagnol)

Je me souviens qu'enfants, on allait en famille au Gasómetro, nous allions en famille, papa, maman, et les enfants. Nous revenions à la maison heureux, bien sûr, surtout pendant la campagne de 46! On verra si l'un de vous arrive à faire un but comme celui de Pontoni alors !
Je salue de façon spéciale les dirigeants et les sportifs argentins. Merci de cette visite, si agréable pour moi. Je vous demande de vivre le sport comme un don de Dieu, comme une occasion pour faire fructifier vos talents, mais aussi une responsabilité.

Chers joueurs, je voudrais vous rappeler spécialement que par votre façon de vous comporter, sur le terrain comme en dehors, dans la vie, vous êtes une référence. Dimanche dernier, je parlais au téléphone avec un jeune d'un groupe : ils voulaient me saluer, j'ai bavardé à peu près une demi-heure avec eux, et bien sûr le grand thème de ces jeunes, c'était le match de demain. Ils vous nommaient tous et ils disaient : "non, celui-ci il me plaît pour ceci, celui-là pour cela".

Vous êtes des exemples, vous êtes des références. Et le bien que vous faites est impressionnant. Par votre conduite, par votre jeu, par vos valeurs, vous faites du bien, les gens vous regardent (...). Bien que vous ne vous en rendiez pas compte, pour tant de personnes qui vous regardent avec admiration, vous êtes un modèle en bien ou en mal.

Soyez conscients de cela, et donnez un exemple de loyauté, de respect et d'altruisime. Vous êtes aussi des artisans de l'entente et de la paix sociale, dont nous avons tant besoin. Vous êtes des références pour tant de jeunes et des modèles de valeurs incarnées dans la vie. J'ai confiance dans tout le bien que vous pourrez faire parmi les jeunes.


(En italien)

Chers amis, je prie pour vous, pour que vous puissiez promouvoir cette vocation si noble du sport. Je demande au Seigneur de vous bénir et à la Vierge Marie de vous protéger. Et je vous demande, s'il vous plaît, de prier pour moi, afin que moi aussi, sur le "terrain" là où Dieu m'a placé, je puisse jouer un match honnête et courageux pour le bien de nous tous. Merci.

lundi 5 août 2013

Voir dans le migrant un frère à accueillir

Message du Pape François pour la Journée Mondiale des Migrants et des Réfugiés.

Chers frères et sœurs !

Nos sociétés font l’expérience, comme cela n’est jamais arrivé auparavant dans l’histoire, de processus d’interdépendance mutuelle et d’interaction au niveau mondial, qui, s’ils comprennent aussi des éléments problématiques ou négatifs, ont pour objectif d’améliorer les conditions de vie de la famille humaine, non seulement dans ses aspects économiques, mais aussi dans ses aspects politiques et culturels. Du reste, chaque personne appartient à l’humanité et partage l’espérance d’un avenir meilleur avec toute la famille des peuples. De cette constatation est né le thème que j’ai choisi pour la Journée mondiale du Migrant et du Réfugié de cette année: « Migrants et réfugiés : vers un monde meilleur ».

Parmi les résultats des mutations modernes, le phénomène croissant de la mobilité humaine émerge comme un « signe des temps » ; ainsi l’a défini le Pape Benoît XVI (cf. Message pour la Journée Mondiale du Migrant et du Réfugié 2006). Si d’une part, en effet, les migrations trahissent souvent des carences et des lacunes des États et de la Communauté internationale, de l’autre elles révèlent aussi l’aspiration de l’humanité à vivre l’unité dans le respect des différences, l’accueil et l’hospitalité qui permettent le partage équitable des biens de la terre, la sauvegarde et la promotion de la dignité et de la centralité de tout être humain.

Du point de vue chrétien, aussi bien dans les phénomènes migratoires, que dans d’autres réalités humaines, se vérifie la tension entre la beauté de la création, marquée par la Grâce et la Rédemption, et le mystère du péché. À la solidarité et à l’accueil, aux gestes fraternels et de compréhension, s’opposent le refus, la discrimination, les trafics de l’exploitation, de la souffrance et de la mort. Ce sont surtout les situations où la migration n’est pas seulement forcée, mais même réalisée à travers diverses modalités de traite des personnes et de réduction en esclavage qui causent préoccupation. Le « travail d’esclave » est aujourd’hui monnaie courante ! Toutefois, malgré les problèmes, les risques et les difficultés à affronter, ce qui anime de nombreux migrants et réfugiés c’est le binôme confiance et espérance ; ils portent dans leur cœur le désir d’un avenir meilleur non seulement pour eux-mêmes, mais aussi pour leurs familles et pour les personnes qui leur sont chères.

Que comporte la création d’un « monde meilleur » ? Cette expression ne fait pas allusion naïvement à des conceptions abstraites ou à des réalités hors d’atteinte, mais oriente plutôt à la recherche d’un développement authentique et intégral, à travailler pour qu’il y ait des conditions de vie dignes pour tous, pour que les exigences des personnes et des familles trouvent de justes réponses, pour que la création que Dieu nous a donnée soit respectée, gardée et cultivée. Le Vénérable Paul VI décrivait avec ces mots les aspirations des hommes d’aujourd’hui : « être affranchis de la misère, trouver plus sûrement leur subsistance, la santé, un emploi stable ; participer davantage aux responsabilités, hors de toute oppression, à l’abri des situations qui offensent leur dignité d’hommes ; être plus instruits ; en un mot, faire, connaître, et avoir plus, pour être plus » (Lett. enc. Populorum progressio, 26 mars 1967, n. 6).

Notre cœur désire un « plus » qui n’est pas seulement un connaître plus ou un avoir plus, mais qui est surtout un être plus. Le développement ne peut être réduit à la simple croissance économique, obtenue, souvent sans regarder aux personnes plus faibles et sans défense. Le monde peut progresser seulement si l’attention première est dirigée vers la personne ; si la promotion de la personne est intégrale, dans toutes ses dimensions, incluse la dimension spirituelle ; si personne n’est délaissé, y compris les pauvres, les malades, les prisonniers, les nécessiteux, les étrangers (cf. Mt 25, 31-46); si on est capable de passer d’une culture du rejet à une culture de la rencontre et de l’accueil.

Migrants et réfugiés ne sont pas des pions sur l’échiquier de l’humanité. Il s’agit d’enfants, de femmes et d’hommes qui abandonnent ou sont contraints d’abandonner leurs maisons pour diverses raisons, et qui partagent le même désir légitime de connaître, d’avoir mais surtout d’être plus. Le nombre de personnes qui émigrent d’un continent à l’autre, de même que celui de ceux qui se déplacent à l’intérieur de leurs propres pays et de leurs propres aires géographiques, est impressionnant. Les flux migratoires contemporains constituent le plus vaste mouvement de personnes, sinon de peuples, de tous les temps. En marche avec les migrants et les réfugiés, l’Église s’engage à comprendre les causes qui sont aux origines des migrations, mais aussi à travailler pour dépasser les effets négatifs et à valoriser les retombées positives sur les communautés d’origine, de transit et de destination des mouvements migratoires.

Malheureusement, alors que nous encourageons le développement vers un monde meilleur, nous ne pouvons pas taire le scandale de la pauvreté dans ses diverses dimensions. Violence, exploitation, discrimination, marginalisation, approches restrictives aux libertés fondamentales, aussi bien des individus que des collectivités, sont quelques-uns des principaux éléments de la pauvreté à vaincre. Bien des fois justement ces aspects caractérisent les déplacements migratoires, liant migrations et pauvreté. Fuyant des situations de misère ou de persécution vers des perspectives meilleures, ou pour avoir la vie sauve, des millions de personnes entreprennent le voyage migratoire et, alors qu’elles espèrent trouver la réalisation de leurs attentes, elles rencontrent souvent méfiance, fermeture et exclusion et sont frappées par d’autres malheurs, souvent encore plus graves et qui blessent leur dignité humaine.

La réalité des migrations, avec les dimensions qu’elle présente en notre époque de la mondialisation, demande à être affrontée et gérée d’une manière nouvelle, équitable et efficace, qui exige avant tout une coopération internationale et un esprit de profonde solidarité et de compassion. La collaboration aux différents niveaux est importante, avec l’adoption, par tous, des instruments normatifs qui protègent et promeuvent la personne humaine. Le Pape Benoît XVI en a tracé les lignes en affirmant qu’« une telle politique doit être développée en partant d’une étroite collaboration entre les pays d’origine des migrants et les pays où ils se rendent ; elle doit s’accompagner de normes internationales adéquates, capables d’harmoniser les divers ordres législatifs, dans le but de sauvegarder les exigences et les droits des personnes et des familles émigrées et, en même temps, ceux des sociétés où arrivent ces mêmes émigrés » (Lett. enc. Caritas in veritate, 29 juin 2009, n. 62). Travailler ensemble pour un monde meilleur réclame une aide réciproque entre pays, avec disponibilité et confiance, sans élever de barrières insurmontables. Une bonne synergie peut encourager les gouvernants pour affronter les déséquilibres socioéconomiques et une mondialisation sans règles, qui font partie des causes des migrations dans lesquelles les personnes sont plus victimes que protagonistes. Aucun pays ne peut affronter seul les difficultés liées à ce phénomène, qui est si vaste qu’il concerne désormais tous les continents dans le double mouvement d’immigration et d’émigration.

Il est important, ensuite, de souligner comment cette collaboration commence déjà par l’effort que chaque pays devrait faire pour créer de meilleures conditions économiques et sociales chez lui, de sorte que l’émigration ne soit pas l’unique option pour celui qui cherche paix, justice, sécurité, et plein respect de la dignité humaine. Créer des possibilités d’embauche dans les économies locales, évitera en outre la séparation des familles, et garantira les conditions de stabilité et de sérénité, à chacun et aux collectivités.

Enfin, regardant la réalité des migrants et des réfugiés, il y a un troisième élément que je voudrais mettre en évidence sur le chemin de la construction d’un monde meilleur ; c’est celui du dépassement des préjugés et des incompréhensions dans la manière dont on considère les migrations. Souvent, en effet, l’arrivée de migrants, de personnes déplacées, de demandeurs d’asile et de réfugiés suscite chez les populations locales suspicion et hostilité. La peur nait qu’il se produise des bouleversements dans la sécurité de la société, que soit couru le risque de perdre l’identité et la culture, que s’alimente la concurrence sur le marché du travail, ou même, que soient introduits de nouveaux facteurs de criminalité. Les moyens de communication sociale, en ce domaine ont une grande responsabilité : il leur revient, en effet, de démasquer les stéréotypes et d’offrir des informations correctes où il arrivera de dénoncer l’erreur de certains, mais aussi de décrire l’honnêteté, la rectitude et la grandeur d’âme du plus grand nombre. En cela, un changement d’attitude envers les migrants et les réfugiés est nécessaire de la part de tous ; le passage d’une attitude de défense et de peur, de désintérêt ou de marginalisation – qui, en fin de compte, correspond à la « culture du rejet » – à une attitude qui ait comme base la « culture de la rencontre », seule capable de construire un monde plus juste et fraternel, un monde meilleur. Les moyens de communication, eux aussi, sont appelés à entrer dans cette « conversion des attitudes » et à favoriser ce changement de comportement envers les migrants et les réfugiés.

Je pense aussi à la manière dont la Sainte Famille de Nazareth a vécu l’expérience du refus au début de sa route : Marie « mit au monde son fils premier né ; elle l’emmaillota et le coucha dans une mangeoire, car il n’y avait pas de place pour eux dans la salle commune » (Lc 2,7). Plus encore, Jésus, Marie et Joseph ont fait l’expérience de ce que signifie laisser sa propre terre et être migrants : menacés par la soif de pouvoir d’Hérode, ils ont été contraints de fuir et de se réfugier en Égypte (cf. Mt 2, 13-14). Mais le cœur maternel de Marie et le cœur prévenant de Joseph, Gardien de la Sainte Famille, ont toujours gardé la confiance que Dieu ne les abandonnerait jamais. Par leur intercession, que cette même certitude soit toujours ferme, dans le cœur du migrant et du réfugié.

En répondant au mandat du Christ « Allez, et de toutes les nations faites des disciples », l’Église est appelée à être le Peuple de Dieu qui embrasse tous les peuples, et qui porte à tous les peuples l’annonce de l’Évangile, puisque, sur le visage de toute personne est imprimé le visage du Christ ! Là se trouve la racine la plus profonde de la dignité de l’être humain, qui est toujours à respecter et à protéger. Ce ne sont pas tant les critères d’efficacité, de productivité, de classe sociale, d’appartenance ethnique ou religieuse qui fondent la dignité de la personne, mais le fait d’être créés à l’image et à la ressemblance de Dieu (cf. Gn 1, 26-27), et plus encore le fait d’être enfants de Dieu ; tout être humain est enfant de Dieu ! L’image du Christ est imprimée en lui ! Il s’agit alors de voir, nous d’abord et d’aider ensuite les autres à voir dans le migrant et dans le réfugié, non pas seulement un problème à affronter, mais un frère et une sœur à accueillir, à respecter et à aimer, une occasion que la Providence nous offre pour contribuer à la construction d’une société plus juste, une démocratie plus accomplie, un pays plus solidaire, un monde plus fraternel et une communauté chrétienne plus ouverte, selon l’Évangile. Les migrations peuvent faire naître la possibilité d’une nouvelle évangélisation, ouvrir des espaces à la croissance d’une nouvelle humanité, annoncée par avance dans le mystère pascal : une humanité pour laquelle toute terre étrangère est une patrie et toute patrie est une terre étrangère.

Chers migrants et réfugiés ! Ne perdez pas l’espérance qu’à vous aussi est réservé un avenir plus assuré, que sur vos sentiers vous pourrez trouver une main tendue, qu’il vous sera donné de faire l’expérience de la solidarité fraternelle et la chaleur de l’amitié ! À vous tous et à ceux qui consacrent leur vie et leurs énergies à vos côtés, je vous assure de ma prière et je vous donne de tout cœur la Bénédiction apostolique.

Du Vatican, le 5 août 2013.